La traite négrière en Afrique et au Cameroun : une activité lucrative qui a appauvrie les uns et enrichie les autres

malumiereetmonsalut Par Le 26/02/2025 à 13:21 0

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Histoire

Marché d’esclaves de Zanzibar-1860. Image : Edwin R L Stocqueler (1829-1895)

Analyse/Le professeur Tchotsoua Michel (1964-2024), géographe, spécialiste en stratégies de développement et en géomatique, avait pour habitude de dire à ses étudiants de « ne pas en vouloir à l'homme blanc en tant qu'être humain, mais en tant que système. » En effet, l’'être humain en général a toujours des besoins qui varient d'une personne à une l'autre, et qui sont encore plus considérables au niveau des grands commis de l'État qui ont le devoir, pour ne pas dire l'obligation de trouver les moyens de satisfaire des populations très exigeantes. Ce qu'il faut plutôt dénoncer et condamner, ce sont les moyens hasardeux employés pour obtenir un certain nombre de satisfactions acquises bien souvent et en Afrique subsaharienne notamment, au mépris de la dignité de l'être humain.

Entre le XVIème et le début du XIXème siècle, des navigateurs et autres explorateurs étrangers ont jalonnés les côtes africaines, animés par une volonté non seulement de découvrir de nouveaux territoires, mais surtout identifier les atouts ou les potentialités économiques de ces territoires et se les approprier entre autres à travers des cartes, la construction d'infrastructures routières, et la création de plantations dans le but d'enrichir encore davantage les plus grandes puissances dont les nationaux ou émissaires avaient toujours l'aval de leurs dirigeants pour se lancer dans cette conquête du monde qui se poursuit encore aujourd'hui en utilisant tous les moyens sulfureux possibles. C'est la raison pour laquelle même les campagnes d'évangélisation ont largement contribuées à mieux asseoir une hégémonie extérieure, et maintenir en particulier la traite d’esclaves noirs qui faisait certes l’affaire les dirigeants locaux, mais encore plus celle des grandes puissances qui jouissaient du privilège d'une main d'œuvre bon marché pour leurs plantations et entreprises situées notamment en Amérique et en Europe. En effet, si le travail a évidemment un coût si ce sont des nationaux de cette grande puissance qui travaillent, pourquoi se passer d'une main d'œuvre bon marché qui se trouve sur un continent peuplé de sous-Hommes que l'on peut obtenir en échange d’objets de peu de valeur?

Le capital humain africain a été vandalisé pour satisfaire des individus « supérieurs » qui n’étaient pas encore conscients du fait que ces Noirs étaient des Hommes comme eux, et que le racisme et les autres doctrines réductionnistes et ségrégationnistes étaient mauvaises. Il a fallu attendre la proclamation de l'abolition de cette activité commerciale honteuse, pour assister non pas à la fin, mais au début d'une fin qui avait encore un long chemin à parcourir car, même les années qui ont suivies cette abolition, s'inscrivaient encore dans un contexte où les Noirs avaient peu de droits, et d'énormes devoirs envers des maîtres blancs qui avaient acheté plusieurs ressortissants africains comme du bétail avec la complicité de chefs locaux qui se préoccupaient plus de leur propres personnes, que de la vie de leurs semblables et encore moins du développement de leur territoire; chose que les civilisations Européens et américaines en particulier avaient déjà conscience.

Extrait d’image du port négrier de Bimbia. Image: Africa Travel Association

Le commerce des esclaves au Cameroun

Des ports négriers furent construits à Douala, à Rio Del Rey et Bimbia. Des milliers d'esclaves y furent déportés vers l'Amérique et l'Europe en plus de la réalité du transit de millions d'esclaves sur ces points de transit qui faisaient partie du circuit international de vente d'esclaves. Une pratique que même l’abolition de l’esclavage en 1848 n’a pas stoppée. Certains avis recueillis par les chercheurs affirment que le roi BILE (BILÉ), surnommé par les anglais William Ier de Bimbia dans l'actuelle région du Sud-Ouest, aurait convaincu certains chefs des villages environnants de participer à la traite négrière même après l'abolition.

Le port de la ville côtière de Bimbia servait de zone de transit, d'entrepôt, de vente et d'embarquement d’esclaves venant ou en transit à Bimbia. Les principaux marchés au Cameroun se situaient sur le fleuve Wouri dans l'actuelle région du Littoral, à Rio del Rey (une baie maritime située dans la région du Sud-Ouest à l'est de la péninsule de Bakassi), et enfin sur l'île de Bimbia-Nicholls island dans le Sud-Ouest, et ses sites associés. Un article publié par l'Organisation des Nations Unies pour la science, l'éducation et la culture (UNESCO) établit une énumération qui se résume au marché Fontem dans le Lébialem (Nord-Ouest), le marché Bamendjinda dans les monts Bamboutos (Ouest), la chefferie de Bana dans le Haut-Nkam (Ouest), la chefferie de Bandjoun dans le koung-khi (Ouest), le marché d’esclaves de Foumban dans le Noun (Ouest), le marché de Kamna dans le Ndé (Ouest), le marché de Laapu à Bangou dans les Hauts-Plateaux (Ouest-Cameroun), le Fondon de Bali-Nyonga dans le département de la Mezam (Nord-Ouest), le centre commercial Mankon dans la Mezam (Nord-Ouest), le Podom de Kom dans la commune de Boyo (Nord-Ouest ), les rives du Wouri et de Yabassi dans le Littoral.

Les trafiquants d'esclaves ont profité de la réalité de l’existence des esclavages coutumier dans un ensemble de milieux favorables à un commerce qui ne contribuait en rien au développement de leurs territoires, mais à celui des pays étrangers pour qui l'Afrique était un grenier de ressources bon marché peuplé de peuples ignorants et barbares à civiliser, et à utiliser comme on veut. Ce trafic devenu illicite après son abolition a duré plus de trois siècles. Les plus sensibles aux idées de dignité de la personne humaine ont contribués à son abolition réelle après le deuxième décret d’abolition signé en France le 27 avril 1848 après celui du 4 Février 1794. En 1850, les Anglais notamment, remplacent la pratique de la traite négrière ou le commerce d’esclaves noirs, par la production d'huile de palme. Mais il ne suffit pas juste d’entériner l’abolition par un décret et adopter des mesures visant à mettre un terme à une pratique qui a eu le temps d’instaurer une échelle de considération au-dessus de laquelle se trouve la « race blanche » pour résoudre le fond du problème. L’acte du 27 avril 1848 de même que les mesures d’application ou de conformités qui ont suivies, n’étaient qu’une étape dans le processus d’abolition « du mythe du nègre sous-homme » et d’une race blanche supérieure qu’il a fallu déconstruire au fil des siècles, pour arriver aujourd'hui à un changement de mentalité d'une large majorité, malgré l'existence d'une minorité qui entretient des tendances racistes et xénophobes.

Si avant le Noir avait une moindre considération de lui-même et du territoire sur lequel il vivait, aujourd'hui en revanche, il en est plus conscient et plus favorable aux partenariats étatiques qui profitent aux deux parties sans injustices qui pourraient laissées penser que l'on a vendu une partie de sa souveraineté à une grande puissance qui s'est donnée le droit de faire ce qu'elle veut en dehors de son Territoire. La vente d'un territoire et de plusieurs îles adjacentes dans le but d'étendre l'autorité d'une reine n'a rien apporté de bon au Cameroun. Cet accord conclu entre Alfred Saker et le roi de Bimbia surnommé par les Anglais William Ier en 1858, n'est qu'une mémoire historique qui a durée 120 années, et qui montre suffisamment à quel point la période coloniale a favorisée des grandes puissances qui ont profitées de cette période pour s'enrichir et gagner en notoriété au détriment des territoires africains qui ont aujourd'hui le droit de nouer des partenariats qui favorisent les intérêts particuliers de leurs peuples.

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Recommandation:

Le tourisme mémorial de l’esclavage dans la métropole de Limbé-Bimbia (Cameroun anglophone)

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