Déficit de la balance commerciale et forte dépendance aux hydrocarbures
Sur la base qu’aucun pays ne peut s’auto-suffire et a besoin des interdépendances pour pouvoir répondre autant que possible à ses multiples besoins au niveau local, le commerce international est d’une très grande utilité. Le problème ne réside donc pas dans le fait de s’approvisionner à l’extérieur ou de faire des importations afin de compenser les productions locales ou répondre aux demandes de plus en plus grandissantes mais de s’interroger sur les conséquences d’une balance commerciale constamment déficitaire dans la croissance d’un pays. En effet, tandis que certains progresse grâce à une balance commerciale excédentaire sur presque toutes les catégories de produits, d’autres par contre et pour plusieurs raisons parmi lesquelles les faibles productions locales, sont plus contraints à importer qu’à exporter au point de connaitre des déficits constant de leur balance commerciale.
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Selon le rapport sur le commerce extérieur du Cameroun publié en 2022 par l’Institut Nationale des Statistiques (INS), En 2017 le volume des importations du Cameroun était de 7978 tonnes pour une valeur de 3054 milliards de F CFA, tandis que le volume des exportations à savoir 6507 tonnes était d’une valeur de 1882 milliards de F CFA. Soit un déficit de -1172 milliards de F CFA.
En 2018, le volume des importations était de 8173 tonnes pour une valeur de 3405 milliards de francs CFA, tandis que le volume des exportations était de 6730 tonnes pour une valeur de 2112 milliards de F CFA ; soit un déficit de -1293 milliards de F CFA.
En 2019, le volume des importations était de 10.011 tonnes, pour une valeur de 3857 milliards de F CFA. Tandis que le volume des exportations était de 7702 tonnes, pour une valeur de 2393 milliards de F CFA. Soit un déficit de -1464 milliards de F CFA.
En fin 2020, le volume des importations du Cameroun était de 8953 tonnes pour une valeur de 3179 milliards de F CFA tandis que les exportations était de 7368 tonnes pour une valeur de 1803 milliards de F CFA. Soit un déficit de la balance commerciale évaluée à -1375 milliards de F CFA.
En 2021, le volume des importations était de 10352 tonnes pour une valeur de 3871 milliards de F CFA tandis que la quantité des exportations était de 7751 tonnes pour une valeur de 2394 milliards de F CFA. Soit un déficit de -1478 milliards de F CFA.
En 2022, la quantité des importations s’élevait à 9517 tonnes pour une valeur de 4911 milliards de F CFA. Le volume des exportations était de 8205 tonnes pour une valeur de 3483 milliards de F CFA. Soit un déficit de -1428 milliards de F CFA. Est-ce en 2024 que le Cameroun commencera à inverser cette tendance ?
Même si le deuxième trimestre de l’année 2023 a été marqué selon l’Institut Nationale des Statistiques par une croissance du PIB de 3,9%, le doute persiste. Rien ne présage malgré des efforts notables à très petite échelle que dans les sept années à venir, le Cameroun sera moins dépendant du volume de ses importations dont les valeurs en termes de prix ont toujours été supérieures à celles de ses exportations. De plus, pour un pays en marche vers son émergence, il y a parmi tant d’autre notamment des besoins énormes en termes de machines et de technologies de pointes qui nécessiterons toujours des financements colossaux pour un pays qui vise une autosuffisance alimentaire et une balance commerciale excédentaire grâce notamment à une meilleure contribution des autres secteurs d’activité pour ne plus dépendre fortement des exportations de pétrole brut et de gaz naturel car en effet, hors pétrole brut et sans gaz naturel, le déficit est encore plus critique. Et le rapport de 2022 sur le commerce extérieur du Cameroun le démontre : « Hors pétrole brut le solde commercial devient de plus en plus négatif : le déficit se chiffre à 2943 milliard de FCFA soit une aggravation de 496 milliards FCFA (20%) par rapport à l’année 2021. Si l’on exclut également le gaz naturel, le déficit s’aggrave davantage atteignant 3495 milliards de FCFA soit une augmentation de 846 milliards (32%) de plus par rapport à l’année 2021 »
Il faut préciser qu’au vu de ce rapport de l’INS, c’est au niveau du commerce des hydrocarbures (pétrole brut et du gaz naturel) que la balance commercial est excédentaire. Ce qui fait en sorte que comme le démontre le rapport sur le commerce extérieur du Cameroun en 2022, sans exportation d’hydrocarbures, la balance commercial serait dramatique. De 2017 à 2022, elles (les exportations d’hydrocarbures) ont toujours constituées entre 50 et 70% du volume des exportations en termes de tonnes et de valeurs en termes de milliards de F CFA. Le commerce des hydrocarbures est donc incontournable dans la croissance économique du pays au point où il est difficile d’imaginé une croissance ou une émergence sans exportations d’hydrocarbures étant donné les retards dans plusieurs autres secteurs économique tout aussi importants.
Le riz a coûté 207,974 milliard de F CFA à l’Etat Camerounais pour une quantité importée estimée à 776.601 tonnes en 2021 contre 591.597 tonnes d’une valeur de 159,871 milliard en 2020. Les importations ont augmentées de 10% pour atteindre 845.000 tonnes en 2022 faute à une demande locale qui excède toujours la production nationale.
Au cours du premier semestre 2023, le Cameroun a importé 407.400 tonnes de riz en raison de 128,4 milliards soit 24% de plus par rapport à la même période de l’année précédente.
En 2024, le plan intégré d’import-substitution agropastoral et halieutique (Piisah) projette un déficit de plus de 500.000 T en 2024 (EcoMatin).
Le blé et méteil ou farine de blé a couté 182,748 milliard pour 966.397 tonnes importées. Les importations de blé ont également connu une hausse de l’ordre de 111.555 tonnes (13%) en 2021 par rapport à 2020. Selon l’Institut National des Statistiques, le Cameroun a importé 920.400 tonnes au cours de l’année 2022 ; malgré une baisse de 41.000 tonnes par rapport à l’année précédente, la préoccupation demeure (investiraucameroun). Au premier semestre de l’année 2023, le Cameroun a importé du blé en provenance de France à hauteur de 292 millions d’Euro soit une hausse de 5 millions d’Euro par rapport à la précédente opération et à la même période. (financialafrik.com)
Mais bien qu’insuffisants, des efforts significatifs sont notables aux niveaux des huiles raffinées et au niveau de la production du Maïs.
Les importations d’huiles raffinées dont la production locale s’élevait à 180.337 tonnes en Novembre 2022 Ont augmenté de 23.119 tonnes (39,7%). L’on est ainsi passé de 58.164 tonnes en 2020 à 81.281tonnes en 2021 pour une enveloppe de 51,819 milliard de F CFA. On ne peut pas en dire autant de la production d’huile de palme qui après plusieurs années de faibles importations donne des chiffres inquiétants. En effet, le plus gros volume d’importation a été effectué en 2022 soit 150.000 tonnes ; la même quantité au premier semestre de l’année 2023 (EcoMatin).
Ce changement s’explique par une baisse de la production locale qui bien qu’étant située entre 350 000 tonnes et 400 000 tonnes peine à satisfaire à la fois les demandes de plus en plus grandissantes à la fois des ménages et les raffineurs ou transformateurs de cette matière première en huiles raffinées et en savons.
Les importations de Maïs en 2021 se chiffrent à 34.082 tonnes pour une valeur de 6,482 milliard de francs CFA contre 19.615 tonnes pour une valeur de 3,066 milliard en 2020 soit une hausse de 73,8% (14.467 tonnes). De plus, comme nous le rapporte l’Agence d’information de l’économie africaine (Ecofin), le Cameroun exportait contre toute logique en moyenne 500 000 tonnes de Maïs de sa production vers les pays de la CEMAC chaque année. Des efforts ont donc été émis afin d’amoindrir l’ampleur de l’importation de ce produit dans le déficit de la balance commercial.
L’amélioration de cette tendance inquiétante fut amorcée l’ors de l’inauguration d’une filiale de la Société Anonyme des Boissons du Cameroun (SABC) appelée la compagnie fermière du Cameroun (CFC) le 5 Novembre 2021 à Mbankomo (1/4 arrondissement du département de la Méfou-et-Akono dans la région du Centre-Cameroun).
Cette nouvelle compagnie fermière a permis une chute des importations de 65,5% à 11. 684 tonnes contre 33.823 tonnes sur la même période l’année précédente (investiraucameroun.com). Selon le ministère de l’économie de la planification et de l’aménagement du Territoire (MINEPAT), la facture de ces importations à presque été divisée par trois passants de 6,4 milliards de FCFA à 2,5 milliards de FCFA Entre 2022 et 2023.
Ces statistiques fournies en majorité par l’Institut Nationale des Statistiques montrent que la demande locale est aussi croissante que la dépendance aux importations massives qui fragilisent la balance commerciale du Cameroun. S’il en a toujours été ainsi, la crise dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest a contribuée dans l’aggravation de cette situation. Le secteur de l’agriculture d’exportation a été fortement impacté mais a tout de même poursuivi tant bien que mal son chemin au fil des années en renouant peu à peu avec la croissance après des longues périodes de récessions. La dernière en date selon l’INS dans son rapport sur les comptes nationaux serait celle des deux derniers trimestres de l’année 2023 qui se sont ponctués par un regain de croissance.